« Je croyais avoir été clair sur le fait de sortir sans moi. »

La flamme dans ses yeux s’aviva comme Jake se montrait déjà désagréable. Elle sera les dents esquissant un mouvement ample pour délasser sa nuque qui craqua bruyamment comme le démon en elle lutter pour ne pas se laisser bâillonner. Le regard plein de courroux, elle prit malgré tout sur elle et répondit simplement :

« Mange. »

Elle posa sur le lit le plateau qu’elle avait fait avec ce que Vasco lui avait donné, prit sa part, bien trop contrarié pour prendre le problème de front au risque d’exploser. Malgré tout, elle finit par répondre :

« Je suis allée me laver, tu aurais pu me voir d’ici en te réveillant, puis je suis allée voir Vasco mais ça… ça me paraît évident. »

Elle aussi entendait Chain au dehors et elle savait que ça ne l’aiderait pas à gagner la bonne humeur de Jake. Non pas que lui en ait parlé mais d’autres l’avaient amplement fait pour lui. Elle n’avait rien dit, gardant pour elle ce dont il n’avait pas envie de parler et par la même occasion son avis.

« Mange. »

Il lui jeta un regard noir et s’il aurait pu se lever et hurler, hurler que c’était lui qui avait la loi, la loi sur elle et sur eux tous, parce qu’il était de sang royal et qu’il avait une belle figure. Parce qu’elle n’était rien, juste qu’une parvenue mordue, et qu’elle… elle… Il eut un long soupir encore un peu remonté, mais il savait pertinemment qu’il était énervé pour autre chose. Pour voir Kheeva minauder autour de son Eros. Il n’en était toujours pas revenu, malgré ce qu’il disait. Il attrapa son plat et engouffra un morceau de viande séché, l’air bas.

« Je suis allée me laver, tu aurais pu me voir d’ici en te réveillant, puis je suis allée voir Vasco mais ça… ça me paraît évident. »

Il mâcha nerveusement sa viande et l’avala tout rond. Ses yeux jetaient des éclairs pour rien, pour personne, ou alors juste pour lui. A chaque fois que Chain martelait de sa voix le rythme des tentures abattues et ramassées, il sentait son cœur se fracassait contre sa poitrine. Est-ce qu’il pouvait oublier cinq siècles d’un amour sans limite et sans frontière ? Est-ce qu’elle avait pu oublier, elle, dans les bras froids de son vampire ? De son mort-vivant quand lui avait eut le front chaud contre sa nuque ? Il la détestait. Et plus il la détestait, plus il détestait Ai. Il reposa son plateau sur le guéridon, posant ses yeux vairons sur l’asiatique.

« Tu t’es lavé devant tout le monde ? T’as tellement le feu au cul que tu le montres à présent ? »

Détestable ? Sans doute. Il la fixait comme s’il n’attendait qu’une chose : qu’elle se jette sur lui pour la brutaliser un peu plus.

« Tu t’es lavé devant tout le monde ? T’as tellement le feu au cul que tu le montres à présent ? »

Ai ferma les yeux pour faire abstraction. Du moins c’est ce qu’elle aurait fait si elle avait eu le parfait contrôle d’elle même. Mais là ce fut le démon qui parla, ou plutôt agît, pour elle. Ses doigts se délièrent et pourtant la gifle ne partit pas. Le coup fut plus perfide :

« Qu’est-ce qui t’énerverait le plus ? Que je le montre à tout le monde mais pas à toi ou alors est-ce que ça n’a juste rien à voir avec moi mais je dois m’en prendre plein la gueule pour que monsieur puisse passer une bonne journée ? »

La voix douce d’Ai s’était évanoui derrière cet étrange grondement démoniaque qu’on connaissait et effectivement, entre le mouvement de ses lèvres on pouvait apercevoir le feu qui brûler immense à l’intérieur.
« Demain tu me demanderas de t’appeler maître et de rester sale si tu te lèves du mauvais pied ? »

Là encore le démon se faisait provocateur car plein de colère ou peut-être était-il colère tout entier.

«  Qu’est-ce qui t’énerverait le plus ? Que je le montre à tout le monde mais pas à toi ou alors est-ce que ça n’a juste rien à voir avec moi mais je dois m’en prendre plein la gueule pour que monsieur puisse passer une bonne journée ? »

Il la fixa et sa tête recula légèrement en arrière comme il accusait le coup ; ce qui l’énervait le plus ? Il l’ignorait. Peut-être que c’était un peu les deux à la vérité. Peut-être qu’elle était juste… Il remarqua les flammes sur ses lèvres et ses muscles se tendirent. Ses yeux brillèrent. En colère, petit dragon ? Comme si ça lui faisait peur de se brûler contre elle.

«  Demain tu me demanderas de t’appeler maître et de rester sale si tu te lèves du mauvais pied ? »
« De te taire et de me lécher les pieds, pour que ça te fasse les tiens peut-être » rétorqua t-il sur le même ton de la provocation.

Il se leva et sa main attrapa sans douceur l’épaule de la louve-dragonne et la serra. Il était proche, ses yeux la fixant jusqu’à l’intérieur. Il l’aurait mangé entièrement sur le moment. Derrière, Chain martelait toujours le travaux du campement de Catterick. Il la fixait, et son sourire, mauvais, s’élargit sur ses lèvres :

« Si tu veux que j’éteigne ton feu, fallait juste le dire Ai, au lieu de chercher à m’énerver de la sorte… »

« De te taire et de me lécher les pieds, pour que ça te fasse les tiens peut-être
- Pour que tu me prennes encore un peu plus de haut ? , le dragon eut un rire moqueur, tu y crois vraiment ? »

Malgré tout Ai derrière le dragon eut une petite grimace en le voyant lever la main mais il se contenta de la saisir par l’épaule sans ménagement certes mais ç’aurait pu être bien pire. Elle gronda mais ne dit rien. Ce n’était pas une anarchiste, elle savait quand même où était sa place.

« Si tu veux que j’éteigne ton feu, fallait juste le dire Ai, au lieu de chercher à m’énerver de la sorte… »

Son feu justement s’intensifia sous la seule allusion… un sourire pointa sur ses lèvres mais il aurait difficile qui du dragon ou de la jeune femme l’avait décidé.

« … je n’ai rien fait pour t’énerver Jake, fit-elle remarquer sans pouvoir se rapprocher ni s’éloigner puisqu’il la tenait, tu as autant besoin que moi d’éteindre ton feu sauf que, peut-être, le tiens est encore plus mauvais que le mien. »

Et ça ce n’était pas le dragon qui le disait bien que la voix de Ai fut toujours déformée.

« Pour que tu me prennes encore un peu plus de haut ? Tu y crois vraiment ? »

Il eut un sourire en coin. Y croire ? Plus que ça. C’était sa place. Enfin, c’était la place qu’il avait assigné à ses mordus depuis le départ de Kheeva. A une sorte de sous-place qui aurait bien mieux convenu à la traîtresse qu’elle était plutôt qu’à Ai qui, jusqu’à maintenant, n’avait jamais rien dit et l’avait toujours suivi, plus fidèle que… Il ne devait pas y penser. Pas maintenant.
Il lui prit l’épaule sous l’impulsion de sa propre colère, grandissante. Il allait la réduire à l’état d’objet, de rien du tout, d’une petite chose allongée dans son lit par son seul souhait. Il la détestait autant qu’il voulait se l’accaparer. Elle n’avait pas le droit de se montrer aux autres, parce qu’elle était à lui. Parce que c’était sa mordue, à lui, et juste à lui. Qu’au delà même de la morsure, il y avait un lien incassable, une responsabilité.

« Si tu veux que j’éteigne ton feu, fallait juste le dire Ai, au lieu de chercher à m’énerver de la sorte… »
« … je n’ai rien fait pour t’énerver Jake, tu as autant besoin que moi d’éteindre ton feu sauf que, peut-être, le tiens est encore plus mauvais que le mien. »
« Plus mauvais que le démon qui t’habite ? Pitié Ai. Ne compare pas mes colères aux tiennes. Je ne mets le feu à rien, moi… »

Sa main se posa sur la cuisse de la jeune fille, l’attirant contre lui, alors que sa langue claquait sur son palet. Oui, il avait besoin de l’éteindre ce feu ravageur, mais elle ne dirait pas non. Elle sentait le « oui » à plein nez, ou tout du moins l’espérait-il. Il avait appris de ses erreurs, alors il la fixait droit dans les yeux comme il glissait sa main sur sa cuisse, de plus en plus haut, ses mains cherchant le nu sous le t-shirt qu’elle portait et qui était le sien par ailleurs.

« Plus mauvais que le démon qui t’habite ? Pitié Ai. Ne compare pas mes colères aux tiennes. Je ne mets le feu à rien, moi… »

Elle baissa son regard vers la main qui remontait le long de sa cuisse tandis qu’il l’attirait à lui d’une façon qui de toute évidence plaisait autant à elle qu’au dragon.

« Ah tu ne mets le feu à rien ? Alors il faudra m’expliquer ce que tu es en train de faire là… »

Ses doigts à elle jouaient sur les avants bras du loup, et si sa voix était toujours celle du dragon, elle ressemblait maintenant plus à un ronronnement qu’à un grondement menaçant ou moqueur. Elle releva enfin le nez, l’interrogeant d’un regard qui bien malgré elle ne pouvait qu’être de braise.

Il y eut un long silence. Comme une hésitation. Puis elle se rapprocha un peu plus, avisant ses lèvres puis ses yeux successivement comme pour demander la permission ou plutôt comme une bête farouche aurait fait en approchant de quelque chose d’aussi attirant que potentiellement dangereux. Mais la situation fut vite jaugée. Elle prit son visage entre ses mains et lui laissa connaître, bouche contre bouche, la vigueur chaleureuse de ce feu qui bordait ses lèvres. Pourtant il ne brûlait pas vraiment c’était… autre chose. Sur la langue de Jake, une caresse furtive et répétée qui avait le velours du feu c’était vrai, qui faisait chaud aussi mais pas au point de brûler.

Dans l’impulsion de son baiser, elle le renversa dans le lit, se retrouvant momentanément penchée sur ses lèvres.

« Ah tu ne mets le feu à rien ? Alors il faudra m’expliquer ce que tu es en train de faire là… »

Il la fixa, et derrière ses longues mèches brunes – le temps lui avait fait rattraper la longueur de son père de loin – il eut un large sourire, dévoilant ses belles canines de loup noble, épaisses et longues. Sa main continua, puisque visiblement, la mordue ne disait rien, bien au contraire – elle répondait savamment.

Elle hésitait ? Peut-être que la jolie louve avait peur de se brûler ? Quelle ironie. Il entrouvrît la bouche, sa langue allant lécher sa lèvre sans peur, et elle répondit aussitôt, lui attrapant le visage entre ses mains de femme. Il frissonna et se laissa aller comme elle le repoussait, tombant sur le dos dans le lit moelleux. Il se tendit, mais sa bouche sur le duvet chaud de ses lèvres était anéantie, sans volonté que celle de répondre à la douce caresse du brasier.

Sa main remonta le long de sa cuisse, pour mettre à nu la cuisse fuselée de la jeune fille, caressait le doux rebondis de sa fesse et le creux de ses reins. Jake eut un léger grondement et se redressa, sa bouche toujours contre la sienne, pour regagner cette hauteur dont il avait besoin. Il s’était laissé faire, et il avait tout perdu. Il avait compris et avait appris de ses erreurs. Ça serait lui qui commanderait.

« C’est toi qui m’allume… » souffla t-il.

Un coup de coude dans le matelas, Jake se redressa et retourna les positions, se retrouvant perché sur elle, ses yeux fixant les siens un instant. Est-ce que seulement il pouvait après avoir détruit Kheeva ? Il ferma les yeux et ses jambes glissèrent entre les cuisses d’Ai, les muscles de son dos s’étirant comme il se dressait sur ses coudes, collant son corps contre celui de l’asiatique. Doux au début, puis fougueux. Sa bouche se mit à lécher avidement sa gorge et ses hanches à se presser contre les siennes. Il mordillait amoureusement, quoi qu’un peu fort son menton, ses yeux vairons la fixant, plus près que jamais du dragon en elle, yeux contre yeux.

Il y eut un bref instant, celui où il la renversa pour reprendre le dessus, où Ai se crispa comme si une image la hantait. Il y avait un peu plus de quinze ans quand il l’avait trouvée dans le parc ses cuisses étaient lacérées de griffures, son corps battu au point d’en garder des marques noires par endroit et de tout cela il ne restait pus maintenant qu’un grand point d’interrogation. Mais cette pensée ne se forma même pas vraiment. Elle s’évanouit consumée par la voix du loup :

« C’est toi qui m’allume… »

Elle le regarda dans les yeux un petit moment. Il lui sembla voir s’échapper une pensée inaccessible. Mais elle n’eut pas le temps d’essayer de deviner que Jake revenait à l’assaut de sa gorge. Elle se cambra, son corps épousant avec une souplesse toute aérienne celui de Jake tandis que ses bras courraient autour le long de son dos comme deux serpents amoureux. A nouveau ses yeux rencontrèrent ceux de Jake, insistants.

« … je ne fais que répondre. »

Elle eut un sourire amusé – à moins que ce ne fût le dragon mais elle ne perdait pas non plus le contrôle à ce point. Dans l’impatience, sans vraiment le vouloir, le brasier gagna en intensité et se propagea en une toute petite flammèche du bout des doigts de Ai à la peau de Jake. Elle suivit des yeux ce drôle de feu follet jusqu’à l’épaule du loup où il put parfaitement lui aussi la voir mourir.

«  … je ne fais que répondre. »

Jake garda un œil sur elle, retenant en lui la bête qui ne demandait qu’à mordre dans sa chaire et à la violer à même le drap, à en tirer les cris les plus suggestifs de la façon la plus bestiale qui puisse. Mais rien. A la place, l’étrange sensation de chaleur qui remonta son épine dorsale le fit se crisper, non pas de peur, mais d’une prudence certaine, une prudence qui l’avait gardé en vie. Il posa ses yeux sur le petit feu follet qui mourût sur la pointe de son épaule. Il reposa son regard sur elle, et haussa un sourcil, un sourire moqueur se plaquant sur sa bouche :

« Tu as une drôle de façon de me répondre Ai. »

Il posa un baiser chaud sur sa bouche, sa main droite glissant à l’intérieur de sa cuisse pour en chercher la saveur chaude, dérober le petit bouton de rose frémissant à son toucher, en faire le contour et le caresser. Yeux dans les yeux, ses doigts attisaient le dragon, jusqu’à découvrir l’intimité, explorer les recoins doux de sa peau pour en tirer des ardentes réactions. Il la fixait, soutenu par son coude gauche quand sa main droite allait jusqu’au fond de ses recherches, en vagues sensuelles et soutenues, désireux de voir briller dans son œil l’envie et le désir.

« Tu as une drôle de façon de me répondre Ai.
- Ca n’était pas contrôlé ça.»

Elle gardait son sourire amusé jusqu’à ce qu’il ne pousse plus loin les caresses et qu’elle ne se tende de plaisir. Son ventre se creusa et le feu se propagea un peu plus en elle mais il n’était pas destructeur. Bien au contraire il restait ardent et doux comme une bête sauvage qui ronronne sous la plus inattendue des caresses.

Doucement ses mains allèrent se glisser entre le tissu et la peau de Jake, juste sur ses hanches comme si elle n’osait pas tout à fait. Après tout, il le lui rappelait bien assez tous les jours. On n’enlevait rien à un prince. Et quand bien même elle ne se plierait pas bêtement à l’ordre de soumission quand elle le trouverait ridicule, elle voulait bien respecter une certaine hiérarchie, ne serait-ce parce qu’il l’avait mordue et que c’était comme ça.
Le dragon en elle l’empêchait de pensait aux côtés désagréables de ce qu’ils étaient en train de faire, elle aurait tout le temps après.

Ses mains finirent par se décider et lui retirèrent son pantalon tandis qu’elle se mordait la lèvre pour mieux contenir un soupir. Il ne la ferait pas crier.

Il soufflait chaudement sur ses lèvres, la voir prendre un certain plaisir à ça, ça lui mettait déjà le feu. Jake avait toujours été facile – pas dans le sens commun, mais il avait toujours eut le goût des draps bien froissés, tout comme son père aimait les belles femmes. Malgré ça, malgré toutes les fois où il avait été éloigné cinquante ans loin de ses deux louves de l’époque et où il avait subi les assauts de nombreuses femelles, il était resté fidèle. Mais pas elle. Il ferma les yeux et fronça doucement les sourcils, son corps se tendant alors que les mains de Ai étaient chaudes sur sa peau, brûlantes quelque part.
Il gronda, un long grondement lui remontant la gorge alors qu’elle défaisait son pantalon. Il ouvrit lentement les yeux, ses yeux vairons la fixant de cette air de colère qu’il avait toujours, du matin au soir, depuis cinquante ans déjà.
Un coup de langue sur ses lèvres et sa main droite se retirait de la chaleur de ses cuisses, rapidement remplacer par la virilité du lycan. Un lourd râle sortit de ses lèvres alors qu’il prenait possession de son corps d’un long coup de reins, conquérant et souverain. Jake avait toujours cet air de prince arrogant, et son regard en disait long sur ce qu’il pensait. Soutenu par ses deux mains, de chaque côté du visage de la louve, son corps se fit doux au début, pour ne pas la blesser, puis plus lourd, plus sensuel aussi. Sa main droite alla par habitude cherchait la cuisse de l’asiatique et la souleva légèrement, la tenant dans sa main comme il accélérait la danse de leur deux corps, plus brutale sans jamais chercher à la faire pleurer.
Il voulait juste se dégager de cette fougue et de cette colère à l’intérieur. Il ne voulait pas d’une valse sereine mais d’une capoeira, d’un truc qui lui ferait donner plus d’énergie que jamais. Il poussa un nouveau râle quand le mouvement de leurs deux bassins se fit trop beau, trop long, comme parfait, et serrant un peu plus sa cuisse, il continua de longues minutes, feulant à même sa gorge, poussant des gémissements légers mais jamais retenus.
Endurant, pour n’avoir jamais coucher qu’avec deux louves, les minutes se firent trop longues peut-être. On entendait de moins en moins de bruit autour d’eux ; plus lointain, le campement se dérobait et on commençait à monter les tentes dans les chariotes. Comme on commençait par les tentes les plus éloignées, on se rapprochait du cœur du campement, s’éloignant par la même occasion d’eux.
Il accéléra davantage, le front suant de cette bonne sueur de l’effort le plus chaud et le plus lascif. Un nouveau râle et Jake ferma les yeux, son corps allant se coller au plus près de celui de Ai comme il finissait, son désir s’échappant en vagues brûlantes. Ses hanches se décollèrent de celles de Ai, doucement, lentement, et abandonna la chaleur de ses reins, soufflant.

« On…est en r-retard, j’crois. » Sa voix essoufflée avait un petit quelque chose de rocailleux à cause de l’effort. Il remonta son pantalon sur ses hanches, se pencha et déposa un baiser sur sa bouche, comme il savait que ça ne se faisait pas d’abandonner un corps sans un mot et sans une attention. « Je te laisse tout mettre dans la chariote. Je vais me laver et je plierais la tente. »

Il se leva, et sortit de la tente, pour aller en effet se laver à la fontaine.

« On…est en r-retard, j’crois. »

Ai rouvrit doucement les yeux. Ses magnifiques yeux noirs plein de velours même quand elle se fâchait. Doucement. Elle avait brûlé, s’était consumée, et une patte griffue dessinée sur son épaule attestait que tout était rentré dans l’ordre.

Elle eut un étrange sourire, un peu plus difficile à pousser sur ses lèvres. Comme si le cœur n’y était pas ou alors peut-être était que le feu l’ayant quittée, elle était fatiguée.

Elle se redressa dans le lit, se couvrant un peu avec le drap. Ses yeux le suivirent comme il se rhabillait déjà. Mais quelque part ils ne pouvaient pas rester là non plus. Il posa un baiser rapide sur ses lèvres. Un baiser qu’elle n’aima pas mais elle ne dit rien parce qu’elle savait pertinemment que le baiser qu’elle aurait voulu était à une autre.

« Je te laisse tout mettre dans la chariote. Je vais me laver et je plierais la tente. »

Elle acquiesça et attendit qu’il disparaisse pour s’habiller, pas encore consciente que sur sa peau, la marque de Jake était imprimée et lisible de tous même de sa femme. Elle ne serait pas sortie sans y remédier sinon. Il ne lui fallut pas longtemps pour tout ranger, méthodiquement. Elle avait toujours été quelqu’un de très ordonnée et pourtant, aussi ironique que cela puisse paraître, en elle tout n’était que désordre.

On monta les tentes dans les chariotes, et on mit cap sur Monaco. La petite principauté, ravagée par la guerre et les batailles quelques semaines auparavant, fit pâle figure dans la nuit. Sur le chemin, Vasco, Nabor et Lapyx se mirent d’accord avec Fenrir et Wolfgang pour ne pas emprunter un bateau des côtes, mais prendre un des leurs. Aussi, après de longues heures sur le chemin, Fenrir se mit d’accord. Ils passèrent une journée entière à attendre que l’équipe dépêchée sur place eut le temps de mettre à l’eau la vieille « Loreley », bateau des âges anciens que les trois compères et leurs enfants avaient chevauché pour traverser le Pacifique, sur les traces de Colomb, ou même avant.
Le « navire », car la belle Loreley n’était pas qu’un stupide bateau et que juridiquement ça n’était pas correct pour Fenrir, amarra au soir du second jour. On monta cheval et marchandise, et on fit installer dans toute la cale des cercueils par centaines pour accueillir les vampires. Du sang fut également entreposé dans de longs congélateurs. Au niveau plus en haut, des chambres de fortunes furent installées. Pour une, deux, quatre, six ou huit personnes au choix. Elles furent réparties par chaque Conseillers, pour diviser finalement les deux niveaux de chambres lycanes en plusieurs quartiers.
Un garde-manger fut installé et approvisionné en grandes quantités. On se préparait pour au moins un mois à deux mois de voyage, Wolfgang avait avertit tout le monde. Et tout le monde rejoignit ses quartiers. Au commande du navire, Vasco, Nabor et Lapyx riaient en chœur.
Un roulement fut installé pour pagayer. La journée, deux équipes seraient installées, et rouleraient toutes les quatre heures. La nuit, les vampires se rajouteraient aux deux équipes en deux équipes, eux-même.
La première journée, quand Wolfgang se posa à côté de Lune de Lycie, tout le monde se posa la question si c’était bien pour ramer qu’il le faisait, mais en voyant le Roi prendre en main la pagaye, on ne douta plus : tout le monde y mettait du sien.
Le cap fut gardé. Deux semaines passèrent, effaçant avec justesse les dernières traces des humeurs de la pleine lune. Pendant ces deux semaines, Mahel avait tenu à garder à distance Lykkos. Dormant dans une chambre de quatre – avec ses trois frères – elle avait également tenu à être dans l’équipe de Celio pour les rames, et se présentait toujours plutôt en retard pour ne jamais avoir à lui parler.
Au repas du soir, pareille. Il n’était pas là, malgré que ce fut le tour des vampires – et donc que ni elle, ni lui n’avait quelque chose à faire. Elle n’aimait pas ces moments, d’autant plus qu’il y avait des chances qu’il la cherche pour lui demander des explications. Elle plissa le nez en quittant à la va vite les cuisines après avoir manger. Elle traînait avec elle l’odeur de Celio qu’elle avait aidé quelques heures auparavant et de Landres avec qui elle avait discuté de Lazarus, et enfin, celle de son Père, qui avait encore trouvé le moyen de lui mettre la honte devant tout le monde en lui demandant par sept fois de la remplacer à la rame « pour ne pas que sa vilaine blessure ne rouvre »… Comme si.

Elle s’arrêta au bout du couloir, et avisa le passage s’il était libre. Avec ses yeux grands ouverts, elle avait l’air de chercher quelque chose, mais il n’y avait rien. Elle fit un pas dans le couloir, pinça les lèvres. Bon. Problème. Le quartier Lusitanie était juste à côté des Lycie (oui, la logique aurait voulu par affinité, mais Fenrir avait classé tout le monde par ordre alphabétique pour qu’il n’y ait aucune gaminerie…même s’il y en avait eut). Elle avança doucement, sans un bruit, et juste devant ses yeux, à deux portes, la porte maudite s’ouvrit. Laventrios. Elle le fixa, avec l’air du chat pris au piège. Mais il referma la porte, seul. Elle baissa les yeux, et avança d’un pas alors que Laventrios partait déjà. La porte s’ouvrit à nouveau. Elle espéra… ! Lefteris ? Lefteris ! …mais ce fut Lykkos.
Un long frisson lui remonta l’échine et la petite louve garda ses yeux sur le sol alors qu’elle rasait le mur. Or, dans un navire, les couloirs sont assez étroits pour que l’on ait du mal à passer à deux comme dans un train. Elle fixait bêtement ses pieds en avançant. Il n’allait pas l’arrêter… Il n’allait pas l’arrêter. Tout ce qu’il voulait, après tout, c’était Leandre. Leandre.
Ce que tu peux être bête ma pauvre fille, cria sa conscience. Elle releva les yeux au moment même où elle passait juste devant lui. Son regard olive tomba dans son regard sombre. Trop bête…

Les lyciens gardaient de leur guerre avec les peuples de la mer de bon reste en tant que marin. L’ambiance dans leur quartier était encore très chaleureuse. On charriait Lefteris en lui disant que sa femme plaisait au roi, on osait une pique envers Leto qui se faisait draguer « pour rire » par Valerian de Byzacène. En bref le temps était au beau fixe sauf peut-être pour Lykkos de Qadesh qui restait irrémédiablement contrarié.

D’abord elle lui léchait la joue et ensuite elle l’évitait (ça se voyait de trop) et baladait l’odeur de Celio Orlov partout dans ce maudit navire. Lykkos n’avait jamais été très commode mais là il touchait des sommets. Il fallait dire que le pauvre prince de Qadesh n’avait particulièrement jamais eu de chance en amour et que chaque fois qu’une femme lui plaisait vraiment elle avait la fâcheuse tendance à finir dans le lit d’un autre qu’elle épousait toujours au final… enfin bon, toujours, ça n’était arrivé qu’une fois mais n’empêche…

Aussi quand il sortit de sa piaule ce soir là et que ses yeux noirs tombèrent sur Mahel qui s’obstinait à le snober, il sentit la moutarde lui monter au nez mais décida qu’il allait la jouer intelligemment … après tout… Moëris ne le laisserait certainement pas la violer et la séquestrer jusqu’à ce qu’elle arrête de dire non sous prétexte qu’il n’avait pas de bol avec les filles. Pourtant fut un temps ça se faisait ce genre de choses…

« D’habitude quand un fille me lèche la joue elle me rappelle au lieu d’aller se frotter à un autre loup., commenta-t-il en feignant un sourire moqueur.

Jouons là cool qui sait…

Depuis qu’elle était toute jeune, Mahel n’en avait jamais eut que pour Lykkos. Elle l’avait toujours connu, avait toujours ri avec lui, avait même marché à ses côtés, tous les deux seuls. Elle avait grandi auprès de Vasco le grand, de Masael le magnifique, de Lazarus l’étoile sombre, et du beau prince perse qu’était le lycien. En vérité, elle n’avait peut-être jamais eut de distinction particulière elle. Elle avait couru pour se démarquer, parce qu’elle n’était pas un homme, et que ça n’était pas aussi facile que ça ? Peut-être juste qu’elle savait qu’elle n’était pas Leandre, qu’elle n’avait pas ses longs cheveux, qu’elle était androgyne avec son visage fin mais sévère à la fois ? Peut-être juste qu’en étant à côté de Lykkos, elle se sentait ridiculement petite. Comme une enfant. Et si c’était ce qu’elle était, elle…
Elle serra doucement les poings en passant, mal à l’aise.

« D’habitude quand un fille me lèche la joue elle me rappelle au lieu d’aller se frotter à un autre loup. »

La Lusitanie s’arrêta et lui jeta un sale regard. Ses sourcils s’étaient instinctivement froncés, et si elle pouvait bien être conciliante, sous-entendre qu’elle pouvait être de ses filles frivoles, c’était pire que tout. Une des pires insultes. Qu’on ne la trouve pas jolie, pas féminine, ou même bête, c’était une chose. Mais alors la traiter de… de…

« Tu insinues que je suis une putain Lykkos ? » Elle le fixait, de cet air de colère qui ne lui allait pas, comme quelque part, dans le fond de ses yeux, il y avait une part de peine. « S’il y avait autant de filles qui te léchaient la joue, tu n’aurais peut-être pas besoin d’attendre qu’une gamine le fasse. »

Mauvaise ? En même temps, c’était bien la première fois que l’on osait dire devant elle qu’il pouvait y avoir quoi que ce soit entre elle et Celio – il allait de soit qu’il n’y aurait rien entre elle et ses frères. C’était aussi dégueulasse qu’avec Celio.

« Tu insinues que je suis une putain Lykkos ? »

Le lycien fronça les sourcils soudain plus dur, plus fermé. S’il prenait sur lui pour ne pas laisser ressortir ses plus mauvais côtés il ne fallait pas s’attendre non plus à des miracles quand on le prenait de cette manière là. Il ne dit rien, se contentant de la crucifier du regard.

« S’il y avait autant de filles qui te léchaient la joue, tu n’aurais peut-être pas besoin d’attendre qu’une gamine le fasse. »

La main de Lykkos se referma sur le bras de la petite rouquine et brutalement, sans la ménager le moins du monde, il la rapprocha de lui, le regard sombre et mauvais.

« Pour quel genre de mec tu me prends toi aussi ?! Me lèche la joue qui je veux et personne d’autre. Et toi je te veux. »

Ca avait au moins le mérite d’être affreusement clair, surtout lorsqu’il la regardait comme ça, immense et fulminant comme un dragon lui-aussi. Pourtant dans ses yeux on ne lisait pas que de la colère, on lisait quelque chose d’autre, de plus possessif, plus dominateur mais aussi plus protecteur.

La main de Lykkos la surprit et la fit rester bête comme elle était toute proche de lui. Elle le fixa, les yeux cherchant une explication rationnelle. Quand on savait comment avait fini sa mère dans les bras de son père, on avait au moins un instinct de conservation plus développée que les autres – quand bien même elle l’avait découvert bien plus tard. Enfin. Pas quand on s’appelle Mahel de Lusitanie, et que votre visage est presque celui d’un garçon. Elle ravala sa salive, l’air bête.

«  Pour quel genre de mec tu me prends toi aussi ?! Me lèche la joue qui je veux et personne d’autre. Et toi je te veux. »

Elle le fixa, et accusa le coup dans un rougissement excessif. C’était bête. C’était vraiment trop bête. Combien de fois elle avait dormi dans sa fourrure ? Et il n’avait jamais rien dis ? Non. C’était bête. C’était forcément un piège pour se moquer d’elle après quand elle se serait coller contre lui. Qui pouvait bien trouver un tant soit peu de sentiments en elle ? Ses amis d’enfance n’avaient jamais rien essayé, et puis les Byzacène, ça n’avait jamais été que par jeu. Peut-être que Lykkos aussi jouait ? Elle se crispa sous sa main et ses sourcils se froncèrent tant que son visage soudain changeait totalement d’expression. On l’aurait frappé qu’elle aurait eut la même face.

« Mais… non… » Sa voix venait de chavirer dans une variable inimaginable. C’était incontrôlé. Elle baissa aussitôt les yeux, elle ne comprenait plus rien. « Avec Leandre, tu.. Et… C’est juste la lune… »

Elle bafouillait, bêtement comme ça au milieu du couloir. La lune ? La lune qui osait lui faire perdre les pédales même quand elle n’était pas entière et pleine ? Toute sa volonté et sa dureté de tous les jours tombaient en miettes. C’était inattendu, et douloureux.

« Je suis pas Leandre, tu… peux pas… »

Elle ravala sa salive, relevant sur lui ses yeux olive. Est-ce que seulement il voyait juste ?

« Mais… non… »

Lykkos leva un sourcil arborant cet air de mâle qui ne souffrirait pas de s’entendre dire non. Pourtant quand on connaissait Lykkos on savait qu’il ne prendrait jamais la direction d’un Masael de Lusitanie.

Quand elle baissa les yeux il se tempéra, jugeant que son non n’était pas un non de provocation. Il préféra attendre la suite…

« Avec Leandre, tu.. Et… C’est juste la lune…
- Léandre ?
- Je suis pas Leandre, tu… peux pas…
- Sshh, souffla-t-il en glissant sa main dans ses cheveux avant de poser son front contre le sien, j’ai aimé Leandre comme un fou, comme un adolescent qui ne sait rien c’est vrai… mais je ne l’ai jamais aimée, jamais voulue, comme je te veux toi. Je te veux Mahel de Lusitanie. Pas parce que tu es rousse. Pas parce que c’est la pleine lune. Pas parce que tu es la nièce de mon amie d’enfance, mais parce que c’est toi que je veux. Et que je n’aime pas sentir l’odeur d’autres mâles sur ta peau…, expliqua-t-il en effleurant du bout des doigts sa joue, … parce que c’est la mienne. Tu comprends ? »

Tu comprends à quel point je te veux et à quel point je ne te laisserais pas me dire non maintenant qu’on en discute vraiment ? Ses yeux plongèrent un peu plus profond en elle avant qu’il ne se penche et ne capture ses lèvres et son cœur avec si cela restait à faire.

« Je suis pas Leandre, tu… peux pas… »
« Sshh » elle ferma les yeux, frissonnant en le sentant là, fermant à moitié les yeux comme son cœur s’affolait de le voir si proche, peut-être même trop au fond « …j’ai aimé Leandre comme un fou, comme un adolescent qui ne sait rien c’est vrai… mais je ne l’ai jamais aimée, jamais voulue, comme je te veux toi. Je te veux Mahel de Lusitanie. Pas parce que tu es rousse. Pas parce que c’est la pleine lune. Pas parce que tu es la nièce de mon amie d’enfance, mais parce que c’est toi que je veux. Et que je n’aime pas sentir l’odeur d’autres mâles sur ta peau…parce que c’est la mienne. Tu comprends ? »

Elle le regarda et déglutit à nouveau, toute bête. Il l’aimait elle ? Pour de vrai ? Elle sentit un long frisson remonter le long de son échine et elle ferma les yeux, tout doucement en sentant sa bouche sur la sienne. Ses joues devinrent pourpre, et Lykkos pouvait à présent se vanter d’avoir eut son premier baiser. Elle se blottit tendrement contre lui, reposant ses mains sur son torse en gardant sa bouche sur la sienne, tout à fait hypnotisée par la chaleur de sa peau.
A l’autre bout du couloir, Masael de Lusitanie venait de débarquer. Un regard sombre se posa sur les deux, puis il recula et disparu à nouveau, remontant sur le pont.
Mahel, qui n’avait rien remarqué, trop intéressée par les lèvres du lycien, décolla à peine ses lèvres des siennes. Si elle ne voulait rien de plus – plus que ça aurait été un blasphème pour elle qui ne voyait pas plus loin qu’un amour platonique et pur, elle restait tout de même pieds contre pieds, et collée à lui, toute sage et petite comparée à cette montagne.

« Je… » Elle le fixait, et finalement secoua doucement la tête. « Tu m’empêches de penser… » Elle ravala encore une fois sa salive, un peu perdue. Elle avait eut tellement honte pourtant. Elle passa sa main sur sa joue, paumée dans ses pensées. « Je fais rien avec Celio. T’es bête. C’est mon meilleur ami. » Premier point à éclaircir pour elle. Elle leva la main et se gratta la nuque, baissant les yeux, un peu gênée. « Et … tu as mis du temps. »

Elle resta timide, pas vraiment habituée à en parler. Après tout, depuis qu’elle avait quinze ans, Masael avait bien vu dans ses yeux cette fascination terrible pour Lykkos, différente de celle que la jeune louve avait pour Vasco. C’était juste… plus profond que ça. Trop profond pour n’être rien ou passager. Elle l’avait traînée, s’était habituée à l’idée de rien, et il lui offrait tout. Si ce n’était pas un piège, alors elle considérait avoir perdu vingt ans au moins.

« Je… Tu m’empêches de penser… »

Il eut un petit rire amusé mais la laissa poursuivre tandis qu’il la détaillait du regard. D’aussi loin qu’il se rappelait il l’avait toujours trouvée jolie. Jolie car unique. Il se rappelait de ces moments passés ensemble à apprendre, à voyager, à tisser des liens indéfectibles. Des liens d’amour, il l’avait appris avec le temps.

« Je fais rien avec Celio. T’es bête. C’est mon meilleur ami. »

Il acquiesça comme pour signifier qu’il ne remettait pas sa parole en doute. Ce qu’elle lui disait lui suffisait. Il avait accepté qu’elle lui passe la laisse. Il avait accepté qu’elle monte sur son dos. Il avait accepté d’elle tout même le plus impensable ce n’était pas pour ne pas lui faire pleinement confiance maintenant. Il était jaloux à l’extrême certes, comme tout lycan, mais il n’y avait personne d’autre à compter de maintenant qui pourrait se vanter de toujours obtenir crédit à ses yeux.

« Et … tu as mis du temps.
- Je ne pouvais pas décider pour toi du moment où tu serais prête.»
Il sourit et la serra plus tendrement dans ses bras parce que c’était sa louve désormais. Et ça le serait pour toujours.

« Tu arrêtes définitivement de me fuir alors ? »

« Et … tu as mis du temps. »
« Je ne pouvais pas décider pour toi du moment où tu serais prête. »

Elle se laissa faire, un léger ronronnement remontant comme elle était bien, là, au creux des bras de Lykkos, sans avoir besoin d’une raison un peu stupide pour y être. Elle cligna des yeux, relevant le nez. Si c’était un rêve, c’était bien cruel.

«  Tu arrêtes définitivement de me fuir alors ? »
« J’imagine… »

Elle eut un petit sourire de chat, se décollant doucement de lui. Ce n’était pas que c’était désagréable, mais elle avait besoin de s’y habituer. Elle n’était pas sa mère pour se laisser coucher le premier soir non plus, encore que sa mère n’eut pas le choix – on lui avait que trop bien répéter. Elle eut un petit rougissement l’air de rien, puis remit en place une mèche de cheveux trop longue :

« J’étais partit pour me...coucher. On se voit demain de toute façon… »

Oui parce que c’était évident pour elle que leur histoire commençait ce soir mais ne rimait pas avec vie commune, enfant et mariage, ni coucherie, dès cette nuit. C’était comme aller trop vite pour son crâne. Elle disparue dans sa chambre, le cœur calme et un sourire bête sur les lèvres. Les premiers « émois » auraient dit le Prince Néhémie, mais ça serait les derniers, parce que Mahel savait que c’était lui et seulement lui. Elle alla se coucher dans son lit en ronronnant, alors qu’au dessus d’elle, Landres ronflait déjà. Elle n’alla même pas le réveiller en lui mettant un coup de pieds et s’endormit en boule, sage.

La semaine s’écoula lentement, rythmée par les joues rouges de la petite louve rousse devant les yeux de son père, tantôt énervé, tantôt exaspéré. Fallait-il qu’il ait une fille, lui ? Le grand Masael ? Le machiste ? Maugréant, il allait et venait, cherchant à éviter les deux ensemble tant ça lui sortait par les yeux. Il remarqua par ailleurs que Leah lui manquait davantage pour parler avec lui de leur fille que pour coucher avec elle. C’était une bonne chose. Mais elle lui manquait cruellement.
Le vendredi, on annonça les festivités du samedi soir. Les Conseillers avaient trouvé bon de respirer un peu de bonheur avant la bataille – même s’il restait encore un bon mois de navigation. Les gardes resteraient en haut, et on fêterait au cœur de la belle Loreley avec de l’alcool lycan les morts et les toujours vivants.
Mahel, Leandre, Elisée, Elisheva et Cléo furent pressentie pour servir. Les tables furent misent dès le midi, et Valerian fut le premier à entrer dans la pièce circulaire qui aurait pu accueillir la Meute entière, si seulement elle avait été complète. Il gronda sur Eschyle pour garder la place pour « sa dame » disait-il. On pensa à Ahulane, mais elle ne participait jamais à ces festivités – malade d’avance à l’idée de voir son mari frivole parler devant tout le monde. Les Anciens s’avancèrent. Fenrir, Wolfgang et Kveld se mirent côte à côté. Elisée fut fixé au comptoir, et Kirill et Lycaon s’y assirent. Les tables s’organisaient, rondes partout dans la pièce. Quand Leto entra, Valerian l’appela avec un large sourire triomphant.
Petit à petit, tout le monde était là, ou presque. Vasco, Nabor et Lapyx étaient en grande conversation. Chain et Cerberus se moquaient amicalement de Bleiz qui n’avait jamais tenu l’alcool lycan – sa malédiction le faisait passer pour un humain sur bien des points.

« Hey ! » Varian agita sa main en voyant Mahel passait. La jeune louve se ramena doucement vers Varian, attablait avec Dorian et Alarian, et les regarda. Elle fixait Dorian comme il semblait qu’il allait demander quelque chose, mais surprit le regard de Varian. Elle grimaça.
« Vous ne saurez jamais vous tenir… Je te vois Varian. »
« Mais moi aussi je te vois Mahel » souriait le plus petit, le sourire large « d’ailleurs, tu me fais goûter ? »
« A quoi ? » Les yeux ronds de Mahel se posèrent sur Varian, et vu qu’il posait sa main sur sa fesse droite, sa main s’étira comme un réflexe et un grand « PAAAF » résonna dans toute la pièce. Un silence suivit, et Mahel détala, offusquée. Varian regarda tout le monde, et tout le monde éclata de rire. La fête avait ouvert depuis quelques heures déjà, mais c’était à lui que revenait d’ouvrir le bal.

« Je reconnais vaguement un air de famille… » se moqua gentiment Valerian, regardant la jeune Leto assise à côté de lui. « Cela fait d’ailleurs bien longtemps que je n’ai ni tâtais de ta sublime croupe ni de ta main avisée ma chère Leto. »

Il se moquait, comme ça, frivole sans l’être. Valerian avait toujours été ainsi. A la belle époque, il avait courtisé Elisheva et Perséphone, puis les filles des Anciens, et… tant de femmes aujourd’hui. Tant d’échecs qui le faisaient sourire. Son seul but avait toujours été de les amusée en s’amusant. Au delà de ça, Ahulane l’aurait émasculé.

Les lyciens arrivèrent petit à petit, sans trop se presser. Lennox avec Héphaïstion en grande discussion sur les sutures qu’ils avaient beaucoup améliorées récemment, Les frères de Qadesh avec les sœurs aux cheveux verts, aussi délicieuses l’une que l’autre. Leto avec le reste de sa clique. Son éternelle bande d’amis c’est à dire Nebi et Jocaste, si bien assortis, juste derrière Héphaïstion et son fils. Laértês arrivait le dernier les cheveux un peu en vrac d’ailleurs.

A peine là que déjà chacun reportait son attention sur Mahel de Lusitanie, la fille de leur chère Leah et se fut à grands éclats de rire qu’ils commentèrent l’événement. Enfin « ils »… encore une fois exception faite de Lykkos. Le prince syrien n’était pas trop pour que sa louve soit serveuse, il savait trop bien comment les hommes, et lui le premier avant, se comportaient à ce genre de soirée. Et pour ne rien arranger c’était ENCORE Varian de Byzacène.

« Allez va, fais pas cette tête elle a du répondant la gamine.

Leandre posa une main ferme sur l’épaule de Lykkos en passant. Un large sourire et elle lui colla un verre dans les mains tout en avisant Valerian qui faisait signe à sa mère. Leandre leva les yeux au ciel. Même après des lustres et des lustres il s’obstinait à jouer les Casanovas avec Leto alors qu’il ne récoltait jamais que des baffes et des insultes fleuries.

« Elle a de qui tenir aussi. , ajouta-t-elle en guise de garantie avant de repartir.

Lykkos maugréa quelque chose entre ses crocs et alla justement s’asseoir à côté de Varian avec un grand sourire… carnassier.

« Je reconnais vaguement un air de famille…
- Elle a de qui tenir tu ne trouves pas ?, fit Leto avec un sourire tout aussi moqueur que celui de Valerian.
- Cela fait d’ailleurs bien longtemps que je n’ai ni tâtais de ta sublime croupe ni de ta main avisée ma chère Leto.
- Tiens bois au lieu de dire des âneries. Ma sublime croupe te salue d’aussi loin qu’elle peut mais va rester sur son garde fou pour l’instant. »

En effet assise comme ça, elle ne risquait pas grand chose de ce côté là. Elle lui mit un verre dans les mains et en pris un pour elle.

« Y a ton pote qui arrive… » siffla doucement Alarian, son regard accrochant aussitôt la figure du prince syrien avec un petit recul. Le jeune homme n’aimait pas les nouveaux, surtout pas à sa table. Dorian ne cillait pas, un petit sourire en coin arquant sa bouche d’une drôle de façon quand Varian relevait le nez, voyant Lykkos se poser à son côté. Il le fixa, et un large sourire se dessina sur les lèvres, un peu provoquant. Varian était loin d’avoir peur de Lykkos, et quand bien même il avait peur, il était assez orgueilleux pour ne pas se démonter.
« Hey Lykkos ! Je t’offre un verre ? »
Comme il disait cela, Varian sifflait et la petite louve rousse tourna le visage vers eux la première. Ses yeux olive se posèrent sur le jeune Byzacène, puis sur son prince. Elle eut un petit sourire amusé et se rapprocha d’eux. A l’époque, il fallait savoir que Valerian passait ses paluches sur la croupe de la princesse devant son père Lior – son neveu – et devant son mari même. Varian avait cette même ardeur que son père, et ça se voyait. Son regard caressa du regard la cambrure de la jeune fille qui se tournait aussitôt vers Lykkos.
« Tu veux quoi Lykkos ? »
Elle le fixait, avec un petit sourire. Varian ne touchait pas, mais ses yeux parlaient pour lui.
Provocateur, oui, mais on remarquait bien le sourire de Valerian sur ses propres lèvres, et si Lykkos avait été assez vieux, il aurait pu voir dans le regard du jeune homme le même regard que Valerian, des siècles plus tôt, âgés de seulement seize ans, louchant sur la première de ses femmes. Le gêne « Casanova », sans doute.

« Je reconnais vaguement un air de famille… »
« Elle a de qui tenir tu ne trouves pas ? »
« Il s’y prend moins bien que moi hélas… » Il eut un petit rire joyeux, voyant Lykkos s’asseoir à côté de Varian. « Cela fait d’ailleurs bien longtemps que je n’ai ni tâté de ta sublime croupe ni de ta main avisée ma chère Leto. »
« Tiens bois au lieu de dire des âneries. Ma sublime croupe te salue d’aussi loin qu’elle peut mais va rester sur son garde fou pour l’instant. »

Il la fixa, un petit sourire amusé plaquait sur les lèvres, et attrapa son verre, l’air calme.

« Ce n’est pas ce qui va me faire lâcher le morceau douce Leto… » C’était peut-être le seul homme à voir en elle une once de douceur. Peut-être parce qu’à côté d’elle, il était encore plus barbare déjà ? Son visage n’indiquait rien pourtant de cette âme terrible qui habitait Valerian de Byzacène. D’ailleurs rien n’aurait pu faire croire une chose. « Si une bataille éclate, je t’attrape sur son épaule et je te kidnappe petite Leto. »

Son regard suivit Mahel puis se détourna, peu intéressé par les querelles de ses fils. Il vida cul sec son verre et en commanda un nouveau. Elisheva passa et déposa sur la table ronde – où Eschyle mangeait en silence, d’un air calme en face de Leto et Valerian – un nouveau plateau de verres, abondant, mais c’était bien parce que l’appétit du Byzacène était grand en alcool.

« Ce n’est pas ce qui va me faire lâcher le morceau douce Leto…
- Même pas si je te le fous sur la gueule ? »

Elle eut un petit rire amusé. Après tout on savait très bien que ça n’allait pas aller plus loin que le jeu entre eux. C’était ce qu’il y avait de bien agréable d’ailleurs, car Valerian quand il n’était pas occuper à couper des têtes était un sacré beau parleur, et Leto n’était pas assez pince sans rire pour ne pas prendre les compliments quand ils venaient simplement pour le plaisir du jeu. Cela dit, elle avait toujours posé la limite. Elle tolérait plus ou moins sa main sur ses fesses en échange de quelques baffes non retenues – ce n’était pas comme si elle allait vraiment lui faire mal – mais ça n’allait guère plus loin.

« Si une bataille éclate, je t’attrape sur son épaule et je te kidnappe petite Leto. »

Elle reporta son regard sur le fils de Nebi qui demandait à la petite Mahel un baiser plutôt qu’un verre. Elle leva les yeux au ciel en imaginant bien la suite des événements.

« Je crois que tu peux compter sur ces deux là pour la bataille. Mais explique-moi un peu, dans tes projets je ne me défends pas ? Parce que figure toi que personne ne me prend moi ni sur l’épaule ni sur autre chose… »

Elle vida son verre, une mine rigolarde et l’œil brillant de malice. Elle n’allait quand même pas jouer les effarouchées et surtout pas avec lui. Il la connaissait un petit peu mieux que ça quand même.

« Ou alors il faut arriver à se faire prendre au sérieux mais tu pars avec un dossier plutôt handicapant mon pauvre Valerian. Il te reste plus qu’à prier que j’ai assez bu. »

Ce qui n’était encore jamais arrivé comme elle avait sans doute hérité de Lukk son peu de réaction à l’alcool…

Un peu plus loin c’était sans doute Lykkos qui priait mais pas pour que Leto se mette minable. Plutôt pour que Varian roule sous la table avant que ce ne soit lui qui ne l’y fasse rouler…