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 Tout s'efface et la roue tourne.

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PROFIL & INFORMATIONS









Zachkariel E. Scylence

Zachkariel E. Scylence
ETUDIANT. ► 1e année de
SORTILEGES & ENCHANTEMENTS.

► MESSAGES : 187
Tout s'efface et la roue tourne.  #Mar 25 Jan - 18:45




Te souviens-tu de cet enfant?

Il n'avait jamais remarqué avant, mais ça sentait la mort, un hôpital. C'était un mouroir, une sorte de fin de vie. Et en avançant dans le couloir, il y avait le silence pesant de cette partie du bâtiment, où on savait que les patients n'en sortiraient pas. Jamais. Il allait finir ici. C'était sûr. Zachkariel avança, un sourire pincé sur les lèvres, l'air de rien. Il poussa la porte, et il y eut un gémissement de douleur, puis à nouveau le silence. Là, sa mère, vieille femme usée par le temps, par les gens aussi. Elle était belle, malgré les années marquées sur son visage, malgré ses yeux un peu vitreux, un peu ailleurs, comme fixant un point qui n'existe pas. Il n'existe que pour elle. Il avance alors, referme la porte derrière lui, et il se retient de pleurer, parce qu'il ne faut pas. Pas maintenant. Pleurer, ça serait la mettre en face du problème, et lui faire de la peine, ce soir, il ne veut pas. Il s'assoit, la regarde, et il a les yeux mouillés. Elle le voit, rit un peu derrière son visage de parchemin usé.

« Tu pleurs, Clayton? Pourquoi tu pleurs? »

Il la regarde, un peu blessé dans le fond, mais tellement habitué. Il a un petit rire, essuie ses yeux avec un sourire en coin, vire ses saletés de larme qui tombent sur le sol, imbibe une énième fois ce sol. Il aurait cru que ses yeux se seraient asséchés, mais l'alcool de cette dernière semaine a rendu son coeur liquide. Un coeur liquide, aux vagues clapotantes. Elle ne comprends pas, comment pourrait-elle? Elle le voit comme un homme, elle se voit comme une femme de vingt ans. Il baisse les yeux, secoue doucement la tête. Sois fort, avait dit Rufus, sois fort, car ce n'est pas après qu'il faudra l'être.

« Tu es tellement belle, que mes yeux t'applaudissent, Sarah. »

Elle le fixe, éclate dans un rire usé, fatigué, bien entre ses draps blancs immaculés. Elle ressemble à un cygne, prêt à rendre son dernier cri, à pousser son chant pour mourir. Mais Sarah est un cygne muet, un cygne fou de douleur, abandonné là, sur le lac, par son prince charmant, quand elle avait besoin de lui, le plus besoin de lui. Il l'a trahi et lui a volé son coeur. La raison ne comprends pas le coeur, mais il est évident que sans coeur, la raison n'existe plus. C'est un lien intime entre eux. Le coeur commande à l'homme. Elle sait pourtant qu'elle va mourir quand elle fixe le plafond, quand elle voit un ange sans le voir vraiment. Une lumière qui l'éblouit, depuis tellement longtemps maintenant. Zachkariel lui prends la main, caressant ses cheveux. Elle sourit, comme une enfant dans un corps de femme, de vieille femme.

« Je vais partir, Clayton. C'est le moment, non? »
« Je ne sais pas, Sarah. Je ne sais pas. »

Il retient les sanglots. Qu'il soit fort comme un boeuf. Elle a un sourire tellement doux, tellement serein qu'il ne peut pourtant pas briser cet instant, lui crier avant qu'elle ne s'en aille qu'il est un bon fils, qu'il est quelqu'un de bien, et qu'il l'aime. Que Clayton l'a détruite, et qu'il ne peut plus rien d'où il est. Qu'elle sache, mais il est clair qu'elle ne sait pas, et au fond, c'est peut être mieux. Qu'elle oublie, tous ces moments où elle a pleuré dans la nuit, où elle a cru que Clayton l'aimait, quand il la serrait contre lui avec une odeur d'homme sur le corps. Autre que la sienne. Elle a un petit rire, joyeux. Elle semble dans un rêve, sur un nuage, quand lui est en enfer.

« On aura un enfant, Clayton. D'accord? On va se marier. Je veux un grand mariage, avec une belle robe blanche, comme celle de Maman. Je veux une traîne longue, et le bras de ton père jusqu'à l'autel. Je veux que tu me dises je t'aime, et que tu m'embrasses, et aussi qu'on ait une maison. Une petite maison, et quand il y aura un bébé, on se dira : qu'on est bête, on aurait du avoir une autre chambre! » Elle rit, rougit un peu, idiote au fond, et Zachkariel ne réponds rien. C'est lui le plus idiot. « On aura un bébé tous les deux, et on l'aimera, parce que c'est naturel, pas vrai, d'aimer son enfant? C'est normal... Eihel c'est joli comme prénom. Pour une fille comme pour un garçon. Notre enfant sera quelqu'un de bien, et il aura un vélo pour ses six ans, parce que moi, j'en ai jamais eut. Et un petit chien quand il le voudra. On lui donnera tout, Clayton, parce que moi j'ai rien eut... »

Merde. Il éclate en sanglot malgré lui, se voûte sur le lui, son front sur la main froide de la pauvre femme. Elle se redresse un peu, le regarde sans comprendre, mais c'est trop tard. Il ne peut pas les arrêter. Les larmes lui crèvent le coeur, et elles brûlent ses joues de haine et de colère. C'est la seconde fois qu'il est tellement triste que ça le fout en rogne, contre ce père qui avait tout à donner, et qui, égoïste, à tout garder pour lui. De quel droit a t-il osé lui prendre cette raison qui était la sienne? Elle le fixe, lui caresse la tête d'un geste tendre, avec un sourire amusé et moqueur à la fois.

« Pleurs pas Clayton, je n'ai pas peur. Ce n'est pas grave. J'aurais aimé voir un albatros, tu sais... Tu saurais faire un albatros? C'était tellement beau, la plage et les bateaux... »

Il se redresse, renifle, la regarde. Il tire de sa poche sa baguette. Il n'a peut être pas le droit, mais il les emmerde, tous. C'est son moment, son dernier moment. Il le voit bien qu'elle fatigue à parler, à bouger, juste même à respirer. Il vise ce plafond magnifique, se concentre et d'un léger mouvement du poignet mets en place ce décors étrange. L'odeur de sel, le vent froid, le cri perçant d'un albatros et le rire d'une mouette moqueuse et rieuse, posée sur le bateau au port. Sarah regarde ce paysage, le coeur qui bat, fort.

« Tu aimes les albatros, pas vrai? » Il retient ses larmes derrière un sourire forcé.
« J'aime, oui... J'aime. » Elle rit, lui sert la main en tremblant un peu, alors qu'autour d'elle, c'est un océan, la bise fraîche, la morsure du sel contre la peau, l'illusion parfaite. Le seul sort qu'il n'aura jamais travaillé, le seul sort qu'il ait réussi pour l'amour d'une femme. De sa mère. « Clayton, tu sais ce que j'aime chez les albatros? »
« Ceux sont les oiseaux qui planent et qui sont princes du ciel. Ils sont les plus grands, les plus clairs, les plus magnifiques. Prince des océans, Baudelaire en fait une triste éloge. » Elle sourit, amusée. « Ceux sont tes préférés. »
« Non. »

Il sursaute, la fixe, un peu absent. Non? Il fronce un les sourcils.

« Les mouettes rieuses, Clayton, ceux sont elles, mes préférées. » Elle rit, un peu, une larme au bord de l'oeil. Elle est fatiguée, et tout ça, c'est trop beau. Lui, il ne sait plus. Son coeur cesse de battre. « Elles ne pleurent jamais, Clayton. Elles sont uniques dans le ciel, si petites, si faibles, et pourtant elles restent là. Elles rient sans cesse, même lorsqu'elles sont tristes. Elles ne perdent pas espoir, Clayton, elles sont petites, mais elles sont belles et fortes. Elles restent la tête haute et se débrouillent pour arriver où elles le veulent. C'est beau, Clayton. De rester fort et de ne pas avoir peur. La confiance en soi, Clay', c'est essentiel à un être humain. Il ne faut pas avoir peur et ne pas regretter, jamais. Ne jamais avoir peur de faire ce qu'il nous plaît, faire ce que l'on veut sans trembler, c'est ça, qui compte, Clayton. Tu n'as pas peur, n'est-ce pas? »

Zachkariel baisse les yeux, un peu bête sur le coup. Lui qui a passé sa vie à fuir.

« Sois gentil avec les gens, Clayton, arrêtes tous tes trucs... Je sais que tu me trompes, et que.. que tu m'aimes pas, tu sais. Tu devrais faire quelque chose, Clay', parce que tu t'assumes. Je vais mourir, et je ne serais pas toujours là pour enlever la seringue de ton bras. » Zachkariel se rembrunit. « Regarde moi, Clayton. Regarde moi ce soir. »

Elle a un petit sourire, en coin. Elle ne voit peut être plus, parce que ses yeux sont vides, loin. Zachkariel relève le nez, la regarde, sent cette main sur sa joue. Il ferme les yeux, sent ses lèvres frôlées celles de sa mère. Le contact incestueux devrait le rebuter, le faire vomir, mais au lieu de ça, il est touché. Touché en plein cœur. Elle l'embrasse, pas comme on embrasse son fils, un ami, mais un mari, et un instant, Zachkariel se laisse faire. Si ça doit être la dernière chose qu'il doit partager avec elle, au moins le fera t-il, et bien, il l'embrasse en retour. Elle retombe mollement dans le lit, un sourire heureux et les joues rouges, comme une adolescente gênée et émue à la fois. Une femme de quarante ans, que le temps a fait plus belle encore.

« Tu ne m'as jamais embrassé comme ça, Clayton... »
« Je t'aime, Sarah. » Il pleur, quel con. Il renifle.
« Moi aussi, je t'aime, Clayton. »

Elle le regarde, un instant, puis referme les yeux, endormie. Endormie et morte. La machine bip, un long bip. Morte, oui. Une alarme résonne dans sa tête, ça explose. Morte? Il suffoque, halète, et ses larmes, plus lourdes, tombent sur ses joues. Il n'a pas lâché sa main, et ce même si un médecin arrive, regarde, tâte cette poitrine encore bien portante. Comment a-t-elle pu...? Il renifle. Il se passe un long moment, peut être un bon quart d'heure comme ça. Le médecin sort un papier, note l'heure du décès. Il relève le nez, fixe Zachkariel.

« Monsieur Scylence... »
« Je sais. » Il relâche lentement la main, passe le revers de sa main.
« Voulez-vous appeler quelqu'un? »
« Non, non... Il n'y a que moi. » Il redresse la tête, et se voit tendre un papier. Il signe et recule à nouveau.
« Vous avez...? »
« Les papiers, je, euh, non. » Il renifle encore, mais les larmes ne veulent pas s'arrêter. « Je vais les faire à l'accueil, c'est ça? »
« Oui, en effet. » Le médecin toussote, se rapproche, un peu. « Si vous voulez de l'aide... »
« Non. Ça ira, merci. »

Et les larmes cessent sur ses joues, pour rien. Il tousse, un peu, et se dirige vers l'accueil. Morte. C'était la première fois de sa vie qu'il était aussi heureux que triste.

 

Tout s'efface et la roue tourne.

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